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Cap21 LRC Toulouse

Alstom, symptôme d'un mal français

28 Avril 2014, 10:12am

Publié par Corinne Lepage

Alstom, symptôme d'un mal français

 

Le rachat d'Alstom pourrait apparaître comme un échec supplémentaire après les pertes de fleurons nationaux comme Publicis, Lafarge, Peugeot ou Justin Bridou. Il est bien davantage. Il traduit l'incapacité de notre pays à définir une véritable stratégie industrielle depuis 20 ans et plus précisément à définir une politique énergétique digne de ce nom. Affirmer le leadership français dans le domaine nucléaire et le maintien du tout nucléaire ne suffit pas! Et surtout il tourne le dos à une réalité qui est celle du fiasco commercial d'une part, de l'absence d'investissement en France d'autre part.

Car en France, l'absence d'investissement dans la sécurité nucléaire croisée avec la tragédie technique et financière que constitue l'EPR, s'ajoute à une absence d'investissement dans le renouvelable ne serait-ce que pour atteindre les 23% prévus en 2020. Certes, l'éolien off shore commence à intéresser, mais le blocage sur l'éolien terrestre et le matraquage de la filière solaire ont fait perdre ses chances à une industrie française du renouvelable dans laquelle nous pouvions avoir un savoir-faire indéniable. Le résultat est notamment pour Alstom une atonie hexagonale non compensée par une conquête des marchés mondiaux du renouvelable alors que ceux-ci explosent.

Tout ceci illustre clairement notre manque d'ambition en matière énergétique et notre absence de vision politique et stratégique. Nous liquidons notre savoir-faire au profit des actionnaires qui jouent perdant sur la France. Oui, la France avait déjà recapitalisé Alstom mais cela ne suffisait pas, il fallait mener en parallèle un véritable programme de transition énergétique sur le territoire français et afficher pour l'Europe de vraies ambitions. Mais tel l'arroseur arrosé, cela pourrait bien être le lobby nucléaire qui est responsable pour une large part de cette politique de gribouille et pourrait en être la première victime. Le risque est grand, qu'il ne s'agisse que du premier acte de déconstruction de la filière nucléaire française, confrontée à un déni de réalité qui trouve son terme. On ne peut pas impunément vivre dans le mensonge. La réalité financière, économique, de marché rattrape l'industrie nucléaire et risque d'être catastrophique pour nous tous en raison de l'absence de mise en œuvre de la transition énergétique.

Il est tard, très tard mais il n'est jamais trop tard pour bien faire. Une Politique Industrielle Commune à l'échelle européenne pourrait nous aider à éviter le pire et à faire en sorte qu'à l'avenir le mercato industriel puisse être pensé en terme européen ; en second lieu, il apparait à l'évidence qu'au lieu de freiner des 4 fers comme le fait la France au niveau communautaire, dès lors qu'il s 'agit d'efficacité énergétique ou de renouvelables, motif inavoué de favoriser le nucléaire, il serait temps de chercher à tirer le maximum d'avantages industriels de la politique européenne et d'œuvrer à une PIC dans laquelle la France pourrait trouver les synergies nécessaires ; en troisième lieu, si jamais un terrain d'entente avec Siemens pouvait être trouvé, en particulier pour maintenir emplois et centres de décisions en France, l'Europe disposerait alors d'un géant à la conquête du monde. Enfin et surtout, une PIC obligerait la France à faire sa révolution copernicienne dans le domaine de l'énergie comme dans les autres et admettre que nous sommes au XXIe siècle et plus au XXe. Le choix n'est pas entre le nucléaire et la bougie mais comme me le rappelait Frédéric Mazella lors de la visite de son entreprise Blablacar, je fais aussi mienne la formule de Woody Allen "Je m'intéresse à l'avenir car c'est là que j'ai décidé de passer le restant de mes jours."

 

Source : Huffington Post

http://www.huffingtonpost.fr/corinne-lepage/alstom-symptome-dun-mal-francais_b_5222915.html

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